Nous avons esquissé précédemment une manière d'occuper le temps de l'oraison. Voici quelques conseils pratiques plus développés pour entretenir cette relation intime avec Dieu qu'est la prière intérieure.
En ce qui concerne le lieu ?
Elire un lieu calme où l'on ne risque pas d'être perturbé par le téléphone ou toute autre interruption intempestive. Ce peut être une pièce tranquille chez soi : "Rentre dans ta chambre, ferme sur toi la porte et prie ton Père qui est là dans le secret", recommande Jésus (Mt 6, 6). Chez soi on peut installer un "coin prière" avec icône, bougies… qui aide à fixer l'attention. On peut prier aussi dans une église proche du domicile ou du lieu de travail, ou se rendre dans un coin tranquille de parc ou de campagne.
Et pour le temps ?
Pareillement choisir un moment de calme, L'aurore semble plus propice. Mais cela oblige à se lever plus tôt. Ou quand les enfants sont partis à l'école, pour la mère de famille… En fixer la durée : au moins un quart d'heure (pour commencer). Commencer de façon réaliste et modeste. Plus tard parvenir à une demi-heure est souhaitable, avec possibilité de la modifier à l'expérience. Une nécessité impérative : faire oraison tous les jours. C'est la continuité et la régularité qui sont importantes pour avancer sur ce chemin d'intimité avec Dieu.
Comment entrer en oraison ?
Bien avant de commencer, demander la grâce d'une bonne Oraison Chacun, à l'expérience, trouvera sa manière. Elle doit amener à rompre avec l'agitation habituelle de l'existence. Prendre une attitude corporelle à la fois stable et éveillée. Faire un signe de croix lent et appliqué. Ou une génuflexion. Ou allumer une bougie… Réciter intérieurement une formule de prière (Notre Père… Venez, Esprit Saint…). Faire un acte de foi en Dieu présent au fond de soi. Se remettre entre les mains du Seigneur pour que cette oraison soit ce qu'il veut - facile ou aride - et produise ses fruits.
Nous devons veiller aux attitudes intérieures plus qu'à celles du corps, très spécialement à deux d' entres elles, fondamentales :
- La dépendance
- La repentance
1°) La Dépendance
Le torrent n'existe plus , s'il se coupe de sa source. Le Sarment sèche et pourrit lorsqu'il se détache du Cep
2°) La Repentance
On peut réciter le "Je confesse à Dieu" ou la "Prière de Jésus" "Seigneur Jésus-Christ, Fils du Dieu vivant, prends pitié de moi, pécheur." "J'ai péché comme un homme, comme un Dieu prends pitié".
Prenons exemple sur St Pierre : "Eloigne-toi de moi Seigneur, je ne suis qu'un pécheur" (Lc 5, 8)
Comment la poursuivre ?
Le Christ nous avertit : "Dans vos prières, ne rabâchez pas comme les païens : ils s'imaginent qu'en parlant beaucoup il se feront mieux écouter" (Mt 6, 7). Saint Ignace de Loyola ajoute : "Ce n'est pas d'en savoir beaucoup qui rassasie l'âme, mais de sentir et goûter les choses intérieurement". Le mieux est de choisir un passage de la Parole de Dieu : écouter avant de parler. Dire au Seigneur la phrase de Samuel : "Parle Seigneur, ton serviteur écoute". Ou bien la phrase de Catherine de Sienne : " Fais moi capacité de foi afin que tu puisses te faire torrent d' amour".
Relire le texte d' Evangile choisi à l' avance en faisant des actes de foi dans le Christ présent, des actes d'adhésion à son vouloir plein d'amour.
Nous pouvons aussi porter devant lui les grands soucis de notre vie : ils tendent à nous distraire… alors les intégrer dans notre prière. L'essentiel est d'entretenir la relation avec le Seigneur présent en nous, donc très vite, établir la relation JE-TU décrite précédemment.
L'essentiel de l'Oraison, c'est l'orientation de départ, la relation JE-TU établie avec toute notre volonté profonde : alors, tant pis, si notre attention n'est pas soutenue ; tant que l'orientation du début n'est pas rétractée, la prière dure ; si c'est nécessaire, réaffirmons cette intention du début, cette orientation de notre volonté profonde. Mais sachons que l'Oraison est portée par l'intention. JE oriente le tréfonds de notre être, notre cœur profond vers Dieu : JE suis là pour TOI JE voudrais que toutes les minutes de mon Oraison TE disent mon amour ; C'est ainsi qu'on instaure la relation JE-TU. C'est indispensable. Attention à ne pas avoir avec Dieu la relation JE-IL. Lorsqu'on rencontre un ami, est-ce qu'on lui dit : " Il a bien dormi ? Il va bien ? " On peut demander à Dieu : " Qu' est-ce que tu désires ? Qu' est-ce que tu veux ? Quelle est ta réaction ? "
Le Père CAFFAREL qui avait une énorme expérience au niveau des couples nous cite cet exemple :
Trois maris rentrent chez eux un soir :
Pour le premier d'entre eux, ce sera comme on dit, " Les pieds sous la table " c'est-à-dire le fauteuil en lisant le journal.
Le second raconte à son épouse en détails tout ce qu'il a fait dans la journée !
Quant au troisième, il essaie de voir et de se rendre compte ce que sa femme attend de cette soirée
Pourquoi ne pourrait-on pas dire aussi au Seigneur : Qu'est-ce que TU attends de moi dans ce moment d'Oraison ?
Donc en résumé : Une seule chose est constante, la nécessité de bien commencer l'oraison :
- établir la relation JE - TU,
- orienter très consciencieusement tout notre être profond vers Dieu.
Autre chose, dans l'Évangile, il y a le fameux passage du jeune homme riche et l'Évangéliste nous dit de Jésus, qu'il le " regarda et qu'il l'aima ".(Mc 10, v21) Pendant toute l'Oraison, penser à ce regard de Jésus sur moi : " En ce moment, Il me regarde et il m'aime "
Fermons les yeux et écoutons le Seigneur nous dire cette phrase tirée de (Is 43, 4-5)
" Tu comptes beaucoup pour moi, tu as du prix à mes yeux, et moi je t'aime. Ne crains pas car je suis avec toi "
Veillons à ce que notre attitude corporelle soit le plus en conformité à la liberté de l'Esprit. Rappelons-nous qu'un corps qui bouge est souce de distractions !
Voilà, si nous n' avons pas tenu compte de toutes ces recommandations, nous risquons de démarrer notre Oraison dans le flou.
Comment conclure ?
Tenir bon le temps fixé : ne pas rogner notre don à Dieu. Demander pardon à Dieu de l'avoir parfois laissé seul en nous évadant dans la distraction. Soigner cette fin d'Oraison ; ne pas quitter le Seigneur tout d'un coup . Le remercier de son amour qui nous transforme (souvent à notre insu). "Seigneur, merci de ce temps passé avec toi. Considère mon Oraison même si je n' ai rien senti, car l'Oraison ne consiste pas à sentir ou ressentir quelque chose .Considère mon Oraison même si j'ai été distrait, car toi tu n'es jamais distrait ."
Terminer par un "Notre Père…" et un signe de croix appliqué... Quitter sans hâte la position et le lieu de l'Oraison pour reprendre calmement nos activités ordinaires. Éventuellement, noter le verset qui nous a parlé, la lumière reçue. Il est bon d'avoir un "carnet spirituel" pour ces notations que nous pourrons évoquer dans la journée, auxquelles nous pourrons revenir dans les moments plus difficiles ou pour nous faire conseiller par un guide spirituel… Ne jamais juger notre Oraison (le travail de l'Esprit est invisible). C'est plus tard que nous verrons les effets : "'Plus tard tu comprendras" (Jn 13, 7).