Des paroles simples
Bientôt l'enfant saura comprendre les mots sans pouvoir encore parler. Ajoutons alors des paroles à nos gestes. Mais qu'elles n'aient rien d'enfantins ! Toute prière exprimée devant l'enfant doit être une prière que l'homme, demain, pourra reprendre sans crainte d'enfantillage. Nos paroles seront simples comme nos attitudes. Pas de grandes phrases, la sobriété et la profondeur des mots pénètrent davantage le petit enfant que des prières savamment développées. Nous pouvons nous servir de prières de la Bible ou de versets de psaumes mis à la portée des jeunes ou de phrases sobres qui s'en inspirent : " Dieu et grand " (bras écartés), " Dieu est bon " (main sur le cœur)….
Si certaines phrases de psaumes adaptés nous paraissent un peu au-dessus de l'âge des enfants, ne craignons pas cependant de les dire devant eux : l'esprit de foi avec lequel nous les prononçons est déjà un message divin qui leur parvient.
Le caractère de grandeur de la prière apparaîtra aux tout-petits si nous avons le souci de leur enseigner une prière désintéressée. Nous avons trop tendance à dire devant nos enfants : " Bénissez papa, bénissez maman, rendez-moi sage… ". Notre prière est bien souvent une prière strictement de demande. Commençons au contraire par faire devant eux des prières de louange : " Chantez le Seigneur car il est bon, car il nous aime pour toujours " ; des prières de remerciement : " Merci, Seigneur, tu es grand et beau ! Pour manteau, tu as la lumière, pour maison, la voûte du ciel ! " ; des prières de demande : " Seigneur, que tous les hommes te regardent et t'aiment ! " Ces prières élargissent le cœur de l'enfant, l'invitant à aimer Dieu et les autres.
Ces gestes de prière dont l'enfant est témoin, nous pouvons les faire devant une image - mais de grâce, qu'elle ait un certain caractère de grandeur, de beauté -, devant une icône ou un crucifix dont le visage du Christ est paisible, ou encore devant la représentation d'une scène évangélique où apparaît la grandeur ou la bonté du Seigneur Jésus. Il faut se garder de ces mièvreries montrant un Dieu dépourvu de majesté - ou à l'inverse un Dieu terrifiant -, un fade Jésus caressant des agneaux ou des colombes….
Moïse, Abraham, Samuel
Vers trois, quatre ans, l'enfant est à même d'écouter un court récit. C'est alors qu'il doit retrouver, de manière plus profonde, dans les personnages bibliques, les attitudes religieuses qu'il a découvertes en nous. Présentons-lui un personnage comme Moïse ou Abraham ou Samuel se tenant bien devant Dieu, l'écoutant, lui répondant, lui disant toujours oui. Ne présentons qu'un personnage à la fois. Pendant plusieurs semaines, l'enfant vivra avec lui, imitant son attitude. Il apprendra à se tenir devant Dieu comme devant lui, il adoptera ses gestes et ses prières. Et sa volonté se formera en se calquant sur celle de ce personnage. Là encore, nous devons faire les gestes avec lui pour ajouter, au caractère de grandeur dont il se sent revêtu, la joie d'agir comme un adulte.
Au cours de ces causeries, gardons le souci de former tout d'abord l'attitude extérieure de l'enfant : enseignons-lui le silence, le calme, montrons-lui comment être attentif à Dieu. Pour commencer, la prière sera simplement de se tenir en silence devant Dieu. L'enfant prendra conscience du regard de Dieu sur lui. Il commencera à lui parler et plus tard l'écoutera en lui. Attendons qu'une attitude soit bien assimilée avant de passer à une autre.
Un lieu de prière
Si nous attribuons à la prière, la grande importance qu'elle doit avoir, nous ferons tout pour que l'ambiance de notre maison aide l'enfant à prier. Bien souvent les pièces de la maison ne lui offrent aucune possibilité de se recueillir. Il n'y a pas de lieu où il puisse trouver Dieu facilement. Nous devrions aménager un " coin de prière ". Certains parents découvrent avec émerveillement combien leurs enfants se transforment lorsqu'ils peuvent aller au cours de la journée, se recueillir quelques instants au " lieu de prière ".
De la découverte du monde à la découverte de Dieu
Nous avons vu que le jeune enfant s'identifie aux choses et aux hommes pour prendre à son propre compte les caractères de grandeur qu'il découvre ou pressent. Il a besoin d'agir et de vivre en se revêtant, pour ainsi dire, des qualités qu'il a découvertes ; il les essaie, il les joue, il les expérimente pour mieux les vérifier. C'est parce qu'il a cent fois refait un geste qu'il accède à une idée.
Si nous voulons que l'enfant aime le Seigneur et s'attache à lui, nous devons faire en sorte que sa prière soit agissante et que son corps y participe. Les gestes que l'enfant adopte dans la prière lui donnent déjà l'impression qu'il fait quelque chose pour Dieu. Sa formation religieuse exigera que ces gestes pour Dieu soient fréquents au cours de la journée. Après un effort, ou s'il a exécuté un beau travail, disons-lui par exemple : " Va dire au Seigneur ce que tu as fait ", " Porte-lui ton beau cahier ", " Offre-lui cette belle page d'écriture ".
Ainsi jusque vers cinq ans, nous devons veiller surtout à faire vivre l'enfant dans une ambiance de prière et de grandeur. Ce dernier sentiment naîtra en lui du caractère de noblesse qu'il percevra dans tout ce qui touche à la prière.
Louis Perin
Patricia (8 ans) me demande un jour :
- Vous le voyez, le Bon Dieu ?
- Non, et toi, tu le vois ?
- Il y a des jours où je crois que je le vois.
- Tu me dis comment il est ?
- Mais je ne peux pas. Ça se passe dans mon cœur. Ça ne se montre pas.
- Alors, tu ne peux m'en parler ?
- Le cœur, il ne parle pas. Il aime.